Sa silhouette et sa présence entre les cordes d'un ring ont longtemps été associées aux plus grands événements de boxe dans le monde. Arthur Mercante est considéré comme l'un des meilleurs arbitres de tous les temps, par sa manière de diriger un combat, son impartialité, son objectivité et sa loyauté. En presque six décennies, il a dirigé 145 championnats du monde sur les cinq continents, parmi lesquels de grandes pages d'histoire.
Né le 27 janvier 1920 à Brockton dans le Massachusetts, Arthur Mercante a tout d'abord été boxeur avant d'enfiler la chemise blanche. Il a puisé son inspiration en cotoyant son oncle Joe Monte, un professionnel qui a été notamment
adversaire de James J. Braddock et Max Schmeling. Fils d'un immigré italien, Arthur Mercante a d'abord pratiqué le football américain et la natation à l'université, avant de participer aux fameux Golden Gloves en 1938, une compétition qu'il a ensuite organisé pendant dix ans. Engagé dans la marine américaine en 1942, il sert sous les ordres Gene Tunney, l'ancien champion du monde des poids lourds et double vainqueur de Jack Dempsey. Durant quatre ans, celui qui fut l'ami de Rocky Marciano, un autre enfant de Brockton, et de Rocky Graziano, est éducateur sportif et fait son apprentissage d'arbitre.
Sa carrière de directeur de combat commence officiellement dans les rangs amateurs après la seconde guerre mondiale. Son parcours chez les professionnels démarre en 1954 à New York, une ville qu'il découvre à l'âge de 8 ans et dont il sera résident durant plus de 60 ans. Après avoir fait ses preuves, il est désigné pour diriger son premier championnat du monde, lors du combat revanche opposant le Suèdois Ingemar Johannson à Floyd Patterson, le 20 juin 1960, qui voit l'Américain reconquérir le titre des lourds dans la cinquière reprise. Sa carrière est lancée et désormais les fédérations ne cesseront de faire appel à ses services.
Le 17 février 1962, il est sur le tapis du Garden pour assister à la défaite
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aux points de Ray Sugar Robinson face à Dennis Moyer. Puis il dirige quatre championnats du monde d'un autre poids welter passé en moyen, Emile Griffith., entre mars 1965 et janvier 1967, et arrête Buster Mathis (11e) face à Joe Frazier. Son professionnalisme fait désormais référence et il est naturellement désigné pour être le troisième acteur de l'un des combats du siècle, Frazier - Ali, le 3 mars 1971 au Madison Square Garden. Son bras tendu lorsqu'il envoie Frazier vers le coin neutre, après le knock-down d'Ali au 14e round, reste gravé dans l'histoire. Arthur Mercante croisera un autre fois la route de Frazier, deux ans plus à Kingston en Jamaïque. Cette fois, il met un terme au calvaire de «Smokin' Joe» face à George Foreman, après six knock-down et 1'35'' dans le 2e round.
Après avoir dirigé le troisième acte de la trilogie Ali-Norton, le 28 septembre 1976 au Yankee Stadium, l'arbitre new yorkais fera la connaisance d'une nouvelle génération de champions. Marvin Hagler, lorsque «Marvelous» conserve son titre mondial des moyens (arrêt 11e) devant Mustafa Hamsho en octobre 1981, Mike Tyson, expéditif (arrêt 2e) face à Tony Tubbs en mars 1988 à Tokyo, et Azuma Nelson, vainqueur (arrêt 8e) de Jeff Fenech lors de leur revanche en mars 1992 à Melbourne. Trois combats manquants où Arthur Mercante a mis en pratique sa philosophie. «Je suis opposé au compte debout. Un arbitre doit êre capable de juger si un combattant est apte à reprendre l'affrontement. Si les jambes d'un boxeur tremblent, si ses yeux sont dans le vague, pourquoi prolongez son agonie ?» Ray Sugar Leonard, Alexis Arguello, Thomas Hearns, Hector Camacho, Julio Cesar Chavez, James «Buddy» McGirt, ou encore Lennox Lewis, Shane Mosley et Roy Jones ont tous estimé à leur juste valeur les appréciations de cet homme qui parfois a endossé le costume de juge, notamment lors des Foreman-Chuvalo, Monzon-Benvenuti, O'Grady-Watt ou Curry-Starling. Il effectua plusieurs déplacements en France pour diriger des affrontements manquants: Jacquot-Mugabi, Gonzalez-Mendy ou Tiozzo-Lucas. Et il se souviendra aussi longtemps de cette soirée du 20 juillet 1991 à Palerme. Ce jour-là, sa chemise vire du bleu au rouge en raison du sang projeté par le blessure au front de l'Italien Massimiliano Duran lors la perte de son titre WBC des lourds-légers face à Anaclet Wamba.
Père de quatre garçons, dont Arthur Jr qui a suivi les pas d'arbitre de son père, Arthur Mercante a retracé sa vie dans une biographie intitulée «Inside the ropes» (entre les cordes). Il s'est éteint le 10 avril 2010 à l'age de 90 ans.
Thierry Raynal
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